Un ministre de l’écologie dans un gouvernement ultralibéral c’est forcément du pipeau. Quel que soit le nom de la personne qui occupe ce poste, il ne sert à rien.
Il faudra bien se mettre dans la tête que le capitalisme est incompatible avec l’écologie.
Le capitalisme, de part sa nature même est un destructeur de la planète et des hommes.
Mr Hulot n’est pas naïf au point de ne pas savoir cela, mais comme il a toujours accepté – sinon défendu – le libéralisme il en est réduit à des aventures personnelles seulement (souvent enrichissantes, au sens propre).
L’aspect positif de l’épisode Hulot c’est que peut être certains auront ouvert les yeux sur l’incompatibilité écologie/capitalisme.
On ne peut pas soutenir un gouvernement qui, encore plus que les précédents, choisit le Medef, le CAC40, la Bourse, et en même temps fait semblant de défendre la planète et les hommes.
LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE SACRIFIÉE À L’ORTHODOXIE DE LA FINANCE ET DE L’ÉCONOMIE
(L’HUMANITÉ – Mercredi 29 Août 2018 – Marie-Noëlle Bertrand)
Transport, énergie ou agriculture : les dossiers par lesquels la transition aurait pu s’enclencher sont nombreux. Mais les mesures à prendre sont incompatibles avec la visée libérale.
Aveu pour les uns, clarification pour d’autres : la démission de Nicolas Hulot met, quoi qu’il en soit, en lumière l’incapacité du gouvernement à transformer un système qui nous conduit droit vers la catastrophe environnementale et sociale. Il n’en va pas seulement de quelques rendez-vous ratés. Que l’ex-ministre de l’Environnement les ait perdus ou qu’on les ait faits sans lui, les arbitrages opérés depuis un an et demi, parfois sous la pression des lobbies, toujours sous celle de l’orthodoxie financière, en disent long de l’incompatibilité entre écologie et libéralisme.
1 – DU GLYPHOSATE AUX MILLE VACHES : LA DÉCONFITURE DE L’AGRICULTURE
Climat, sols, biodiversité ou sécurité alimentaire : c’est peu dire que le dossier agricole canalise à lui seul bien des attentes. Responsable de près de 30 % des émissions de gaz à effet de serre (GES), interpellé sur son usage des pesticides ou sa capacité à proposer le bien-manger pour tous, le système agroalimentaire est sommé de se transformer sur le fond. C’est ce que promettaient de faire les états généraux de l’alimentation, organisés fin 2017, lesquels devaient déboucher sur une loi à l’avenant. Les premiers ont déçu, la seconde a fâché. Rien, dans le texte soumis au Parlement début juillet, ne mentionne une date de sortie pour le sulfureux glyphosate, herbicide classé cancérigène probable. Nicolas Hulot avait l’idée que la France l’interdise d’ici trois ans. Stéphane Travert, ministre de l’Agriculture, s’y opposait. Les députés ont tranché en faveur du second. La FNSEA s’est dite soulagée, l’Union des industriels pour la protection des plantes (Uipp), où se retrouvent tous les gros de l’agrochimie, aussi.
Plus globalement, la ligne du gouvernement, depuis un an, aura été de laisser aller un système qui mise sur le rendement à l’hectare et pousse à l’intensification des productions. Rien n’est venu remettre en cause, par exemple, les grands systèmes d’exploitations céréalières, dont les produits visent les marchés mondiaux et alimentent la spéculation sur les matières premières. Les systèmes d’élevage intensifs – ferme des mille vaches ou autres usines à poulets – n’ont pas été plus inquiétés. Les agriculteurs bio, en revanche, ont des cheveux à se faire, quand les aides destinées au maintien de leurs exploitations tendent à disparaître.
2 – EUROPACITY, NOUVEAU SYMBOLE DES INFRASTRUCTURES INUTILES
Bien sûr, il y a eu l’abandon de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Mais, au-delà, reste en projet une série d’infrastructures questionnées sur leur utilité autant que sur leurs impacts environnementaux. C’est le cas d’Europacity. Porté par le groupe Auchan et un conglomérat chinois baptisé Wanda, il prévoit la création d’un vaste centre commercial et de loisirs dans le Val-d’Oise. Près de 270 hectares de terres agricoles situées sur le Triangle de Gonesse et comptant parmi les plus fertiles d’Europe risquent de disparaître. Ce modèle de concentration commercial implique, en outre, que le consommateur prenne sa voiture pour faire les courses, pointent ses opposants, et va a contrario de schémas territoriaux favorisant les mobilités douces telles que le vélo ou la marche à pied. Nicolas Hulot avait clairement pris ses distances – « Un centre commercial gigantesque avec une station de ski artificielle, c’est la folie des grandeurs du XXe siècle. C’est exactement ce que je ne veux plus demain ! », déclarait-il y a peu. C’est pourtant grâce à l’intervention du gouvernement qu’Europacity peut se targuer d’être encore sur les rails : en mai, l’État a fait appel d’une décision du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, lequel avait annulé l’arrêté autorisant la zone d’aménagement concerté (ZAC) indispensable à sa construction.
3 – FRET OU VÉLO : LE TRANSPORT DANS UNE IMPASSE
Il est responsable de 15 % des émissions mondiales de CO2, et pourtant le secteur des transports reste malmené. Alors que l’exécutif a déclenché l’ire des cheminots en lançant, par voie d’ordonnances, une réforme de la SNCF qui achève la libéralisation du rail public, Nicolas Hulot, ministre de tutelle d’Élisabeth Borne, a brillé par son silence. Tout juste le ministre de l’Écologie s’est-il fendu, en avril, d’une tribune dans les colonnes du Journal du dimanche, par laquelle il tente de défendre son attachement aux enjeux de fond. « C’est parce qu’on a besoin du train pour réussir la transition écologique que nous avons lancé ce chantier », écrivait-il. Pourtant, en transformant l’entreprise publique en société anonyme, en ouvrant le rail aux quatre vents de la concurrence et en tirant un trait sur le statut des cheminots, c’est bien la casse de l’outil ferroviaire que cette réforme engage. « Nous devons massivement développer le fret ferroviaire », poursuivait Nicolas Hulot, taisant là encore le fait que le « pacte ferroviaire » gouvernemental filialise l’activité de transport de marchandises de la SNCF, fragilisant le report de la route vers le rail.
Ce n’est pas la seule panne en matière de transport durable. La loi sur les mobilités propres et le plan vélo censé en être le pilier sont dans les limbes. La Fédération des usagers de la bicyclette (FUB) blâme plusieurs acteurs : « Bercy freinerait sur le montant d’un fonds vélo, les instances patronales s’insurgeraient contre une indemnité kilométrique vélo obligatoire, l’industrie automobile refuserait que le malus des voitures polluantes finance un bonus en faveur des (véhicules propres). »
4 – PRIVATISATION ET COURTS-CIRCUITS ÉNERGÉTIQUES
Au chapitre de la transition énergétique, on épinglera l’ouverture à la concurrence des barrages hydroélectriques ou encore les cajoleries concédées par la France à l’huile de palme indonésienne ou malaisienne. La privatisation des premiers, alertent ceux qui la dénoncent, risque d’ouvrir encore plus grand les vannes de la marchandisation d’un bien commun, quand de la gestion des structures dépendent l’irrigation et l’alimentation en eau potable d’un grand nombre de bassins. Elle rend, en outre, aléatoire la régulation d’une énergie renouvelable indispensable au futur mix.
Concernant l’huile de palme, son essor est aujourd’hui le principal moteur de la déforestation en Asie du Sud-Est et des émissions de CO2 de la planète. Alors que 75 % de celle consommée en France se retrouvent sous forme d’agrocarburants, Nicolas Hulot avait dit son intention de « fermer la fenêtre » à ce type d’utilisation. Sans impact auprès de ses collègues. « La France n’est en faveur d’aucune interdiction et aucune discrimination (contre l’huile de palme – NDLR), au niveau national comme européen », déclarait, en janvier, Florence Parly, ministre des Armées, lors d’un déplacement en Malaisie… laquelle envisageait alors l’achat de 18 avions de combat Rafale de fabrication française.
5 – COMMERCE OU COOPÉRATION ? LE MAUVAIS CHOIX
On ne peut pas ne pas évoquer, pour finir, le Ceta, accord de libre-échange entre l’Europe et le Canada. Emmanuel Macron avait promis de suivre les conclusions d’une commission d’experts nommée par ses soins « pour dire ce qu’il en est exactement des conséquences environnementales et sociales de cet accord ». Elles furent accablantes, ce qui n’a pas empêché le gouvernement d’acter la mise en œuvre provisoire du traité, rendant le texte opérationnel à 90 % dans le pays. À l’inverse, les députés de la majorité ont supprimé, au grand dam des ONG, l’extension de la taxe sur les transactions financières qui devait entrer en vigueur le 1er janvier 2018, au motif d’attirer les banques cherchant à quitter Londres à cause du Brexit. Cette extension aurait pourtant permis de renforcer l’aide nécessaire aux pays en développement pour faire face au changement climatique, dont Nicolas Hulot déplorait la faiblesse, hier, sur France Inter.
Marie-Noëlle Bertrand et Marion d’Allard
Réchauffement climatique, biodiversité, etc..
Pourquoi le capitalisme est-il incompatible avec l’écologie ?
L’Humanité, Lundi, 10 Septembre, 2018
Avec les contributions de Catherine Larrère, philosophe, Raphaël Larrère, ingénieur agronome, Hervé Bramy, responsable de la commission écologie du PCF et Benoît Monange, directeur de la Fondation de l’écologie politique. Télécharger le texte en PDF
Le capitalisme est la cause du déréglement climatique, par Naomi Klein