Lettre du PCF Finistère – 26 février 2023
Envolée des prix de l’électricité et du gaz, marché de l’énergie: l’immense gabegie!
La crise énergétique bat son plein. Les coûts de l’énergie explosent mettant en grande difficulté les particuliers, comme les entreprises et les collectivités. Le gouvernement fait mine d’aider, un peu et de manière insuffisante, tout en refusant de s’attaquer aux causes réelles du problème.
Pour certains ménages, la situation est dramatique: les 2/3 des ménages en électrique sont en tarif réglementé et 1/4 des ménages pour le gaz.
Cela veut dire que nombre de familles subissent, comme les entreprises, la folie du marché et ce d’autant que les démarcheurs commerciaux des énergéticiens ont pour tradition d’aller dans les quartiers populaires depuis la libéralisation car cela leur est plus facile de convaincre de changer d’opérateurs et d’abonnement chez les personnes âgées, ou chez les personnes aux revenus les plus modestes, ou encore par téléphone. Et le tarif réglementé du gaz s’arrête cet été.
Citons l’exemple d’une dame à Brest qui a une facture de régularisation 2022 de Total énergie de 6000€ (elle a déjà payé 2000 euros) alors qu’elle travaille en temps partiel subi. Son KwH est à 50 centimes TTC et 18 centimes pour le tarif réglementé sans même avoir 18 degrés dans son logement.
Pensons aussi au cortège de drames des fermetures de boulangeries ou d’industries, dues à l’augmentation faramineuse du coût de l’énergie, et au chômage qui peut suivre.
Le coût de l’énergie en France qui devient plus élevé que les coûts salariaux aura des effets dissuasifs pour les investisseurs.
Les conséquences catastrophiques de cette gabegie sur notre société toute entière sont à relever, avec l’inflation généralisée des prix et des répercussions sur les particuliers, l’économie, les collectivités, les industries et l’artisanat, le chômage, l’écologie…
La guerre en Ukraine n’étant qu’un prétexte révélateur et la cause véritable la spéculation capitaliste qui a trouvé un espace de profitabilité extrême dans le secteur de l’énergie privatisé et libéralisé.
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Comment est-on passé, en 25 ans, d’une situation d’autosuffisance de production d’électricité et de contrat de gaz de longue durée stabilisés, à la situation énergétique d’aujourd’hui?
Les directives européennes de l’énergie ont organisé, depuis le début des années 2000, la libéralisation-privatisation du secteur. Les pouvoirs politiques qui se sont succédé depuis se sont appliqués à démanteler EDF et à libéraliser le secteur de l’énergie.
Ces directives s’appuient sur le Traité de Maastricht (1992), puis le Sommet européen de Lisbonne (2002). Le but: satisfaire les appétits des capitalistes en privatisant les secteurs publics très rentables dans le domaine de l’eau, des transports, des télécoms et de l’énergie notamment.
Cela a généré en France, en 2004, la transformation d’EDF en société anonyme avec l’ouverture de son capital en 2005.
Depuis le 1er juillet 2007 (présidence de Nicolas Sarkozy) le marché de l’électricité est ouvert à la concurrence pour les particuliers.
En 2010, Nicolas Sarkozy et François Fillon font adopter la loi NOME (Organisation du Marché de l’Electricité) avec l’Arenh (accès régulé à l’électricité nucléaire historique), Nicolas Sarkozy qui n’hésite pas à endetter EDF de 7 milliards d’euros!
Ce système fait obligation à EDF de revendre 1/4 de sa production nucléaire à ses concurrents à un tarif très bas leur permettant de faire des profits (le prix de revente de l’électricité à prix cassé d’EDF est de 42 euros-46 euros le Mwh alors que la cour des Comptes estime que le coût de revient se situe entre 50€ et 55€!). Aujourd’hui, avec le prix de l’énergie fixé par le marché, des opérateurs peuvent revendre l’électricité nucléaire à 500€ le Mwh dans le cadre de l’Arenh (Accès régulé à l’électricité nucléaire historique). Actuellement, Total revend son électricité nucléaire acheté à prix bradé à EDF dans le cadre de l’Arenh 180, 200, 300, 400, 500 euros, en fonction de la fluctuation des marchés et de la loi de l’offre et de la demande, sachant qu’on est plutôt en manque d’électricité en ce moment, ayant fragilisé les capacités d’investissement et de maintenance d’EDF sur son parc. C’est ainsi que
Fabien Roussel, responsable du PCF, estime que Total Energies a volé entre 6 et 8 milliards à EDF, une part non négligeable des 36 milliards de bénéfices de Total Energies, alors que la facture énergie bondit pour les particuliers et les familles, les entreprises, les collectivités.
Ces concurrents qui se devaient au bout de 12 ans de produire leur propre électricité… ne produisent toujours rien, ou si peu. Ils se gavent sur le dos d’EDF et spéculent sur le dos des consommateurs.
Avant la loi NOME et l’ouverture du marché au particulier le prix du KWh des Tarifs régulés de vente (TRV) reflétait le coût de production du transport et de la distribution ajoutés à l’amortissement des moyens de production. C’était l’État qui fixait les prix sur proposition d’EDF. Les taxes étaient composées de la TVA et de la TLE (taxe locale de l’électricité versée aux communes).
Aujourd’hui, c’est le cours de la bourse, avec la spéculation qui l’accompagne, qui entraîne la flambée des prix!
Désormais, c’est la Commission de régulation de l’électricité (CRE) qui propose le montant des TRV à l’Etat et ce ne sont plus les coûts de production de transport et de distribution restés stables qui entraînent la flambée des prix! C’est donc bien le cours de la bourse de l’électricité, la hausse des taxes et les marges exorbitantes des fournisseurs privés aux mains des actionnaires exigeant le meilleur rendement qui font s’envoler les tarifs.
Le PCF réclame le retour au Tarif régulé de l’énergie pour les particuliers, les entreprises, les collectivités. Au lieu de vagues promesses, véritables opérations de com sans réalité effective substantielle, de chèques énergie, de boucliers tarifaires… Les opérateurs financiers alternatifs n’ont plus à se faire du beurre sur le dos d’EDF et le nôtre.
Que penser d’un gouvernement qui promet aux PME, aux petits commerçants, de bloquer les tarifs qui leur seront appliqués à 280 € le Mwh alors que les opérateurs alternatifs achètent 70% de leur électricité 42 € le Mwh.
Autre aberration: le prix de l’électricité est fixé sur le prix du dernier Mwh produit, très souvent avec du gaz, donc indexé sur son cours aujourd’hui au plus haut, du fait de la guerre en Ukraine, alors qu’en France l’électricité est produite essentiellement avec du nucléaire et de l’hydraulique.
Le PCF demande à ce que l’on puisse s’extraire du marché européen de l’énergie quand les prix sont trop en décalage avec les réalités de la production et du prix de production. Nos voisins espagnols et portugais ont obtenu une dérogation de la commission européenne sur l’énergie: nous pourrions agir avec eux.
Il faut en finir avec le racket de l’Arenh qui subventionne des acteurs alternatifs qui ne produisent rien et qui accumule les profits.
Regagnons ensemble notre maîtrise publique de l’énergie, de l’électricité et du gaz, avec nos deux Epic EDF et GDF 100% publics, permettant aux collectivités locales, aux entreprises, aux usagers d’accéder à des tarifs régulés de vente calculés sur les coûts de production de transport et de distribution.
La nationalisation d’EDF-GDF qui a permis à la France de bénéficier d’une souveraineté énergétique partielle, et d’une électricité accessible et peu chère, a été l’œuvre du programme du Conseil National de la Résistance, mis en œuvre dans ce domaine par le ministre communiste Marcel Paul, ancien enfant de l’assistance publique, paysan puis ouvrier, dirigeant syndical CGT, résistant et déporté, qui deviendra ministre de la Production industrielle à la Libération. Le combat de sa vie fut la création de l’entreprise publique EDF GDF et du programme de production d’électricité par la réalisation de grands équipements hydro-électriques et nucléaires.
Aujourd’hui, les villes et l’ensemble des collectivités territoriales construisent leur budget 2023 dans un contexte de baisse réelle des dotations de l’État, non réévaluées à la hauteur de l’inflation, et d’une facture énergétique qui plombe littéralement les finances, affectant les taux d’épargne et les capacités d’investissement. Ces collectivités peinent à construire leur budget 2023 sans dégrader le service public. Elles sont exposées à des renoncements d’investissements, à l’abandon de certains projets ou à des augmentations d’impôts.
Ainsi, Quimper QBO doit faire face à une augmentation de 5 millions d’€ de sa facture d’énergie, Morlaix de 1,2 million d’euros, Plomelin de 128 000€, etc.
Dans les lycées de la région Bretagne, l’impact sur les factures d’électricité est de + 480%, parfois plus, et pour les factures de gaz de + 70%. Les établissements ont vu leur facture multipliées par 4 ou 5 entre 2021 et 2022, et ce n’est pas fini.
L’envolée actuelle des prix du gaz et de l’électricité montre de manière cruelle aux usagers à quel point il est important que notre pays retrouve sa souveraineté sur la fixation des prix de l’énergie. Ce ne sont pas les coûts de production de transport et de distribution restés stables qui entraînent la flambée des prix, mais bien le cours de la bourse de l’électricité, la prédation des spéculateurs et des actionnaires qui font s’envoler les tarifs générant les super profits de Total énergie, d’Engie et des autres « fournisseurs dits alternatifs » laissant 13 Millions de personnes en situation de précarité énergétique. Il est aujourd’hui primordial de maintenir les tarifs réglementés du gaz et de l’électricité qui reflètent les coûts réels de production et de distribution, d’en finir avec le pillage organisé de l’Arenh et d’abolir la loi Nome.
A l’instar de nos voisins espagnols et portugais nous devons déroger au droit européen pour sortir l’énergie des griffes du marché pour retrouver notre maîtrise publique de l’énergie et un service public conforme à l’héritage de la nationalisation de 1946. La France a le poids politique nécessaire pour l’obtenir.
Sortir du marché ne signifie pas une sortie du système électrique européen, les interconnexions et les échanges entre opérateurs, fondés sur des contrats bilatéraux mutuellement avantageux, doivent être garantis.
L’énergie est un bien vital dont chaque être humain a besoin pour se nourrir, se chauffer, se déplacer ou se soigner il ne peut être confié aux marchés financiers.
Le PCF Finistère entend engager une campagne départementale sur ce sujet: distribution de milliers de tracts (cela a déjà commencé à Quimper et dans la région de Morlaix notamment, lettres aux parlementaires, lettre et demande d’audience au préfet, motions à proposer au vote dans les conseils municipaux et communautaires, conférence de presse et rassemblement devant la préfecture).
La proposition d’un référendum pour la sortie du marché de l’énergie et un retour à EDF/GDF 100% public pourrait être une option pour chercher le soutien de la population, des collectivités, syndicats, associations d’usagers. Il est envisagé de proposer cette revendication au PCF National (référendum soit d’initiative parlementaire, soit d’initiative populaire comme contre la privatisation de l’aéroport de Paris).
N’hésitez pas à nous remonter vos informations et témoignages sur les augmentations des prix de l’énergie – électricité et gaz, dans vos communes, collectivités, entreprises, ou en tant que particuliers: federation@29.pcf.fr
L’énergie, un bien commun de l’humanité
ÉLIANE ASSASSI Présidente du groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste du Sénat
ALAIN OBADIA Président de la Fondation Gabriel-Péri
À l’origine, la libéralisation, la fin des monopoles et le dépeçage des entreprises historiques du secteur de l’énergie organisés par les instances de l’Union européenne, main dans la main avec les gouvernements, étaient censés faire baisser les prix grâce aux vertus de la concurrence. Cette présentation idyllique s’est vite fracassée sur les dures réalités du capitalisme de marché et de sa logique de rentabilité.
Très rapidement, le lobby des fournisseurs alternatifs de gaz et d’électricité s’est mobilisé pour dénoncer les prix trop bas pratiqués en France. Il fallait augmenter les tarifs réglementés pour permettre à la concurrence de s’installer durablement en assurant aux opérateurs privés le taux de profit attendu. Ce raisonnement illustrait à quel point les dogmes néolibéraux nous font marcher sur la tête.
Bien avant le conflit ukrainien, les hausses des tarifs étaient intervenues pour les usagers, quasiment chaque année. Les prix sur les marchés de gros de l’électricité étaient soumis à la spéculation. Cette situation était encore aggravée par leur indexation sur les prix du gaz, sans aucun rapport avec la structure de la production électrique en France.
La fin des tarifs réglementés était programmée. La mise en place de l’Arenh (accès régulé à l’énergie nucléaire historique) s’est traduite par une ponction indue sur les revenus d’EDF au profit de ses concurrents, qui pouvaient désormais acheter à bas prix l’électricité nucléaire pour la revendre plus cher aux usagers.
Le déclenchement de la guerre en Ukraine a largement dégradé ce contexte global. Dans un environnement marqué par les pénuries et les décisions de boycott, les prix n’ont pas seulement augmenté, ils ont explosé. Des dizaines de milliers de commerçants, d’artisans, de PME, d’exploitations agricoles, mais aussi de collectivités locales sont en grave difficulté, voire acculés à la faillite du fait de l’augmentation délirante de leurs contrats de fourniture d’électricité ou de gaz ou encore du prix des carburants.
Des centaines de milliers de familles ne peuvent plus payer leurs factures et doivent choisir entre se nourrir et se chauffer. Dans ces conditions, le bouclier tarifaire gouvernemental se révèle insuffisant. La spéculation s’en est donné à cœur joie. Il suffit, pour s’en convaincre, de se référer au bénéfice d’Engie qui s’envole de 43 % ou à celui de Total, en hausse de 90 % malgré les pertes du groupe en Russie. Quant à EDF, le gouvernement lui a imposé, en 2022, plus de 8 milliards de perte sèche supplémentaires en l’obligeant par décret à vendre, à prix réglementé, 20 TWh d’électricité aux fournisseurs privés, en sus des 100 TWh annuels. EDF est ensuite obligée de les racheter sur le marché à un prix six à dix fois plus élevé. Plus globalement, l’Europe a troqué sa dépendance au gaz russe contre des sources plus chères et plus polluantes, dont les gaz et pétroles de schiste américains.
Cette situation conduit à un enseignement majeur : la soumission du secteur de l’énergie aux lois du marché capitaliste produit des résultats catastrophiques. Le dogme selon lequel l’énergie est une marchandise – qui plus est une marchandise comme les autres – relève à l’évidence de l’escroquerie et profite aux seules multinationales et aux courtiers.
Il faut affirmer haut et fort que l’énergie est un bien essentiel, un bien commun de l’humanité. Elle doit être produite et gérée comme tel. Le droit à l’énergie doit être assuré pour toutes et tous et ne pas être compromis par la spéculation financière. Pour répondre aux besoins, la planification à long terme intégrant les dimensions économique, technologique, sociale et écologique doit devenir la règle. Il en va de même des coopérations entre producteurs, comme entre producteurs et consommateurs. En France, EDF et Engie doivent être renationalisées et démocratisées. Un pôle public de l’énergie doit être créé et la qualité de service public de ce secteur réaffirmée.
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