Capitalisme et démocratie seraient synonymes. C’est l’histoire que l’on nous raconte depuis des générations. La concurrence et le taux de profit seraient les gardiens vigilants du droit de vote ; les dividendes et les marges, ceux du pluralisme ; la propriété, un droit inaltérable, et les inégalités, une loi naturelle.
Si le libéralisme économique a un temps été associé au libéralisme politique, force est de constater que, aujourd’hui, la démocratie est devenue pour le capital un obstacle à contourner, voire à enfoncer. Cela conduit dans certains pays à un genre de national-capitalisme autoritaire qui fait de l’éviction des libertés fondamentales une condition d’efficacité de l’économie. Mais partout, la mission assignée au politique est de fournir l’environnement le plus propice aux affaires.
En France, l’épisode de la censure du gouvernement Barnier en est une illustration quasi caricaturale. Durant des jours, patrons et actionnaires se sont succédé sur toutes les antennes pour expliquer au nom du besoin de « stabilité » que la censure serait « irresponsable ». Que ce gouvernement mène une politique rejetée par la majorité des Français ne compte pas pour « ces gens-là ».
Il leur importe surtout que les orientations politiques et économiques du pays soient à leur avantage exclusif. La stabilité dont ils parlent n’est autre que la poursuite de l’austérité, la réduction toujours plus importante de la rémunération du travail, la compression des recettes fiscales, le rognage du périmètre d’intervention de l’État. Pour constater à l’arrivée que les services rendus se dégradent, et expliquer qu’il vaut mieux les transférer « au marché ».
Depuis la dissolution, le président de la République a tout fait pour que rien, même la volonté populaire, ne puisse gêner les intérêts capitalistes qu’il sert. Il entend bien continuer. C’est la condition pour que ces intérêts le maintiennent au pouvoir. Pour contrecarrer ce coup de force, les forces du Nouveau Front populaire, sans forcément avoir toute la même stratégie, doivent continuer à cultiver ensemble cet espoir de pouvoir vivre mieux qui a éclos au printemps dernier.
Derrière la crise politique, une convulsion capitaliste
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Jean-Marie Harribey, économiste
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https://blogs.alternatives-economiques.fr/harribey/2024/12/07/derriere-la-crise-politique-une-convulsion-capitaliste
[Éditorial de l(Humanité] Aux sources de la crise
Voir aussi mon article précédent :
Démocratie, une 5e République à bout de souffle
Et sur la démocratie :
https://www.gastonballiot.fr/?cat=5